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31 mars 2009 2 31 /03 /mars /2009 00:14



J'accepte tout, volonté impuissante de retenue, je suis désormais Ta proie. J'étouffe mes larmes d'amour, le corps recroquevillé sur le lit froid dans la chambre obscure où ne filtre qu'un mince rayonnement de pleine lune à travers le volet fermé. J'écoute mais ne veux entendre les gémissements dans la chambre voisine. Déjà la torture. Plus tard l'écoulement du ventre qui se vide dans le seau prévu pour. Alors je peux m'endormir. C'est fini.

Le lendemain je souris.

Et TU me chasses de ton lit pour aller dans un autre. J'obéis toujours. Et quand je te suis le lendemain soir j'entend le sifflement et d'un coup le poignard se plante dans la porte que j'ai juste le temps de refermer sur moi.
J'aurais dû mourir ce soir-là...
Tout abandonner pour Toi, te suivre dans notre perte annoncée - une destinée obscure monte dans le secret des profondeurs et caresse le vide des jours.

Il a fait très chaud cet été-là. On arrosait tous les jours nos plantations de légumes dans le petit jardin près de la ferme. Eric chantait à tue-tête "le petit bonheur", je l'écoutais longtemps, l'ouïe comblée, c'était il y a trente trois ans. Et il avait trente trois ans...Il ne pouvait conduire une voiture ou une cammionnette sans la mettre dans le fossé. Il me parlait avec l'assurance d'un aîné, me sentir confiante avec lui atténuait cet amour quasi masochiste que j'éprouvais pour Toi. Sa vie et sa différence parvenait parfois à atténuer le goût amer dans ma gorge.

Aujourd'hui il est mort.

Souvent l'après-midi je courais loin dans le chemin, comme pour me sauver, et je m'allongeais ou plutôt m'effondrais dans l'herbe grasse du pré. Au-dessus de moi, recevoir l'enchantement du bleu impalpable me donnait l'impression d'exister...Le soleil brûlait ma peau, le corps léger et chaud oubliait la sensation de vide avec la jouissance de ces moments-là. Vivre comme un pré-être sans parvenir à nommer cet être que j'étais, quelque part dans l'inachevé. La question de l'existence ne peut être réglée que par l'existé lui-même. Exister c'est sentir, être au-delà de soi, une épreuve, une violence, un pouvoir de choisir entre des contraires, un affrontement, une quête infinie de soi. J'avais choisi. La non-existence.
TOI.
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T
non-existence...et pourtant tu te devais d'exister pour assouvir ses phantasmes. Une chose existe-t-elle ? Il semblerait, c'est ce que disent nos sens.AmitiéThierry
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Présentation

  • : Maelström
  • : Longue histoire que cette perte de soi... Un récit douloureux. Un exutoire. Une femme à côté de son corps durant 28 ans. Cette femme : moi. Un récit aussi où la prose prend une grande part.
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