17 avril 2009
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L'air glacial transperce l'os. Rue noire déserte. Au passage une porte s'ouvre. L'air chaud sort.
Mon corps - y a t-il un corps ?....Pénètre.
La fumée enveloppe mon corps.
Des tables en bois. Des chaises en bois. Un bruit sourd. Dans le fond.
Un chien dort sous la table.
Une vieille femme à côté fixe ses verres vides, les yeux troubles. Hagards. Elle semble attendre.
Un chant s'échappe. De quelque part. Murs envahis de tableaux.Bruits de verres qui s'entrechoquent.
Une chaise vide attend devant la porte dans le coin. Je m'avance.
Je m'avance lentement vers elle, tire la chaise, comme absente.
Et pose ce qui me reste de corps dessus.
Un rire fuse. Puis le silence. Mordre ce silence à pleine bouche pour qu'il hurle.
Enfin la musique reprend. Les sons envahissent ma tête vide.
Mon coeur cogne. Ralentir les battements de la tempe.
Soudain l'homme s'asseoit face à moi. Figée sur la chaise. Me sourit. Je lui réponds. Ce que je devais. Ce que j'avais appris.
Puis deux verres sur la table. Deux verres emplis d'un liquide clair.
Liquide âcre, amer. Qui réchauffe le corps.
Une ombre passe. Sinistre.
Et les éclats de rire au loin fusent à nouveau. Ne plus entendre le coeur.
Ma main se tend vers le verre. Encore. Et encore. Goût suave dans la gorge. Et la pénombre.
La pénombre apaise la torpeur.
Les rires se sont tus. La main tremblante allume une autre cigarette.
La fumée envahit l'espace. Il n'y a plus d'espace. J'étouffe. Le temps a disparu.
Le cendrier est plein. La fumée enveloppe les corps. Il n'y a plus de corps.
La porte des toilettes claque. Une autre cigarette s'allume.
La brûlure de la cigarette me rappelle que j'ai une main.
Mon souffle saccadé happé par la chaleur...Je ne sens plus ma respiration. J'ai cessé d'exister.
Mes mains tremblent maintenant. Et mes yeux vides. Troubles.
La bouche sèche réclame. L'ivresse pour combattre.
L'homme continue de parler. Il sait la possession. L'évidence s'impose.
Illusion nécessaire entre l'imagination utopique et la possibilité réelle.
Le maître reste un prédateur mais l'esclave sera en fait le seul à devenir humain.
La vieille femme plus loin s'est écroulée sur la table. Le chien dort à ses pieds. Au coin de la bouche un peu de bave s'écoule.
Le verre devant moi danse. L'homme attend, avide.
Il ne sait mon corps vide, mes yeux vides. Le temps s'est arrêté.La chaleur de l'alcool envahit les corps.
La musique s'est tue. Il n'y a plus de musique. Des corps se lèvent et partent. Les lumières disparaissent.
L'homme me prend la main, réduite à l'obéissance. Il est temps de partir.
Et mon autre main, doucement, caresse la vieille femme au passage.
Son chien va la raccompagner. Vers son nulle part.
La porte s'ouvre. Vers ailleurs. Suivre l'homme.
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